An
Exploration of my Process of Creation through a live Artist Journal, full of my Drawings and Words.

J'explore jour après jour au gré des pages remplies de dessins et de mots mon Processus de Création.

29 novembre 2015

PAGE 137: (CO)+LE FACTEUR HUMAIN-Laforest Laurin-Ouellette.Tangente Danse

 SKETCHING CHOREOGRAPHY .4


Mercredi 25 novembre au Monument National, j'assiste à la générale d'un autre spectacle de Tangente Danse:
(CO) et de LE FACTEUR HUMAIN par les chorégraphes Laforest et Laurin-Ouellette.

Comment transcrire une suite de mouvements chorégraphiés décrivant une expérience physique du corps dans l'espace et le temps avec mise en scène de plusieurs danseurs (6 interprètes pour la pièce (CO) et un duo pour LE FACTEUR HUMAIN)...
...surtout quand je suis aux prises avec des questions purement techniques d'installation pour faciliter ma vision de la scène dans la pénombre d'une part, et la mobilité de mon propre corps expressif tenant ses outils de dessin en main sans faire de bruit d'autre part!?!

La photographie crée des instantanés de mouvements morcelés habillés par l'effet de l'éclairage. Une représentation esthétique du corps en action de danser.
Mais a-t-on une vision ou même une sensation du propos et du ressenti du mouvement de l’œuvre entière représentée, de son développement?
L'illustrateur qui travaille aussi avec des outils de vidéo et de photographie avant d'interpréter sur écran par d'autres médiums numériques sa vision du spectacle, décrit-il le moment réel qu'il a vécu en recevant en lui cette chorégraphie?

Le dessin sur le motif , quand il n'est pas simplifié à l'unique représentation fidèle du réel, à mon sens apporte une version intime, personnelle, humaine et fragile, du moment vécu en face à face avec une histoire, une situation, un événement. Le témoignage d'un mouvement de Vie.
Il décrit une suite d'émotions diverses qui naissent au premier contact du lieu et du geste, qui se transforment au rythme du développement du mouvement perçu dans l'espace du temps, puis qui meurent et disparaissent.
Mais cette suite n'est pas si simplement linéaire, elle est élans et rebroussements, va et vient, spirales incessantes décrivant le Temps, révolution continue sur une orbite mystérieuse autour d'un astre rayonnant son énergie de création.

Restent alors imprimées sur la surface blanche du papier, des traces, mi-réfléchies mi-spontanées, l'énergie captée par le trait, la pulsation de la tache, le silence de l'attente, le vide du doute, les ratures de la peur de se jeter dans la relation inconnue qui se noue là, sans apriori ni crainte ni jugement du résultat.
Sans effacer, réajuster, recomposer, sans cacher la faille ou l'exploit.
Sans attente d'une fin, car la fin viendra naturellement comme une énergie d'extase qui jaillit et s'essouffle, et avec elle le détachement de toute cette expérience humaine et vivante.

Mais avant le détachement complet qui signifie l'oubli des détails faisant place aux souvenirs vagues, le voyage de l'artiste éveillé s'amorce sur la route de la conscience. Avant la défaillance de la mémoire, relire ces notes, décrypter le message invisible, et rendre visible le moment vécu grâce à un travail de recherche d'ordre et d'équilibre. Une quête de l'essentiel.
Et enfin, écouter l'histoire. Regarder.
Être spectateur de son propre spectacle achevé.
Puis tourner la page sur une autre, vierge à nouveau.

Alors tout ça pour dire que mes dessins n'ont pas pour but de commenter ni de décrire fidèlement les mouvements des corps en action de danser, ce que la photographie fait très bien, mais mon propre mouvement organique et humain face à l'expérience d'une relation, d'une inter-action, avec un moment de vie, qui dans ce contexte est la réception d'une œuvre chorégraphique.
Avec toutes les limites de mes outils manuels, de mon savoir technique d'aujourd'hui, de la fragilité de ma vision et de mon être physique et émotif, avec toute cette vulnérable candeur des humbles poètes du quotidien dont je me revendique appartenir.







DESCRIPTION par Tangente des pièces:

LE FACTEUR HUMAIN: 
"les chorégraphes-interprètes créent un dialogue incarné où diverses perspectives se rencontrent. Il s'agit d'une réflexion sur les déviations, les détours et les raccourcis. Comment le facteur humain peut-il dévier une trajectoire linéaire et prévisible? C’est avant tout une pièce où la gestuelle est dynamique et instinctive. En travaillant consciemment sur la physicalité, les deux jeunes créateurs laissent l’inconscient s’exprimer librement et permettent au corps de dire ce que les mots ne peuvent dire."

(CO):
"Dans le cadre du projet Fly, l’École de danse contemporaine de Montréal a invité Evelyne Laforest et Rémi L. Ouellette et leur a offert la chance de créer une pièce avec six magnifiques interprètes. Investies, elles se plongent dans un univers où la réverbération du mouvement, l’osmose et l’infini se métissent. Influencée par les thèmes du vertige, de la densité et de l’étourdissement, une danse très physique et fluide évolue au rythme des états et s’approprie l’espace. 

(CO) se penche sur la résonance du mouvement et tente de rendre cette matière tangible."


À mon sens il n'est pas de mouvement sans histoires, de "physicalité" pure, ne serait-ce que par le fait qu'il apparaît, se développe, et disparaît. Tout mouvement est une trajectoire. Toute trajectoire "dit", "raconte", s'inscrivant dans le Temps, circulaire. Tout est cycle de Vie/Mort/Vie. Et c'est la toute première Histoire de ce monde. Tout mouvement créé s'en va vers son déclin, pour pouvoir se poursuivre et se développer à nouveau. Transformation. N'est-ce pas le chimiste Lavoisier qui disait "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme"?
C'est ce que j'appelle "les petites histoires du quotidien".
Comment les capter avec mes outils et ma vision artistique? Qu'est-ce qu'elles nous disent individuellement, et collectivement? Que raconte chaque acte créateur? Quelle est ce langage par lequel une œuvre artistique communique à l'autre et le rejoint dans sa propre mémoire de vie et d'expériences? Que partagent consciemment-inconsciemment les chorégraphes contemporains en faisant danser des corps vivants humains?